Depuis toutes ces années, ils n'avaient jamais fêté leur anniversaire de mariage, pourtant cette année là ils étaient décidés à marquer le coup. La vie de couple et sa rivale, la vie tout court, n'avaient pas été de tout repos ces derniers temps.
Voilà ce qui les a amené aussi loin, au bord de ce lac, au pied de ce volcan, ce soir de Janvier. Le ciel était clair, ils étaient debouts sur un parterre d'herbe, à quelques centimètres de l'eau reflétant une lune plus pleine que jamais, à se demander silencieusement si ce n'était pas ringard de se sentir bien en regardant les étoiles en se tenant la main. Peu importe, c'était fait et, à cet instant, tout semblait juste et mérité. Aucun bruit ni aucune présence n'aurait pu déranger l'évidence et la simplicité de ce moment, où le murmure des palmiers et les indiscrétions de quelques animaux et insectes inconnus les accompagnaient.
Alors qu'ils reprenaient contact avec le monde, une masse blanchâtre, lourde et majestueuse projeta son ombre sur eux en leur volant leur lune.
A peine avait-ils eu le temps de réaliser que cette avion volait bien trop bas, il s'écrasait sur le volcan, lui redonnant vie dans une explosion violente et instantanée.
Dans un sursaut d'effroi, il lâcha sa main et fit un pas en arrière. Dans sa chute, son regard resta figé sur l'éruption de flammes et la carcasse de l'engin qui s'étalait dans le ciel en autant d'étoiles filantes. Puis un froid surprenant, un retour soudain à la réalité, sa première pensée fut pour son téléphone portable qu'il allait noyer. Il s'est souvenu d'où il l'avait acheté, quel forfait il avait pris, les images qu'il contenait et le jour où il avait transféré tout ses contacts de son ordinateur sur ce petit objet indispensable. En une demi seconde il avait revu toute la vie de son téléphone, puisqu'il savait la sienne sauve. Il a même eu le temps de culpabiliser de cette pensée et, comme si la culpabilité suffisait à racheter les erreurs, se sentir rassuré de ne pas être un monstre de matérialisme
A peine la tête sorti de l'eau, il l'a aperçu au milieu des gouttes, les paumes sur le menton et les doigts cachant à peine ses yeux encore hésitants quand à l'émotion qu'ils devaient transmettre, rire ou peur? Il l'a vu elle, dans un surprenant contre jour, un décor d'arrière plan bien réel fait de flammes et de fumée. Il se mit alors à nager, poussant sa brasse dans une longueur étrange face à un spectacle anodin et violent. Alors qu'il sortait de l'eau et qu'elle le prenait dans ses bras, l'air inquiet, les hurlements stridents et effrayants provenant de la colline leur rappelèrent que leur petit drame méritait d'être relativisé.
Ils avancèrent vers la plage, muets, et puis, impuissants ils se serrèrent l'un contre l'autre. Il l'a regardait. Dans ses yeux pleins de larmes se reflétait le brasier. Ils s'embrassèrent longuement alors que progressivement, les explosions firent place à des crépitements, les cris se transformèrent peu à peu en râles et puis plus rien.
Ils étaient seuls au bord du monde, égoïstes et inutiles, en face de son agonie.
Il sorti alors son téléphone de sa poche humide, son fond d'écran (2 petits paresseux blottis les uns contre les autres) était toujours là, la vie était belle.
December 1, 2009
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